Le Tchad délivre des papiers d’identité aux personnes déplacées internes de la province du Lac pour leur éviter l’apatridie
L’Agence Nationale des Titres Sécurisés du Tchad (ANATS) a procédé ce 28 septembre 2021 à Bagasola à la distribution de 3000 cartes d'identité aux PDI
Ce programme qui est le premier au Tchad, est le fruit du partenariat entre le HCR, L’Agence des Nations Unies pour les réfugiés et l’ANATS et s’inscrit dans la stratégie de protection et de recherche des solutions durables au profit des personnes relevant du mandat du HCR. Et s’arrime aux engagements du Tchad au Segment à Haut Niveau (HLS) sur l’Eradication de l’Apatridie d’ici 2024 et au processus de Bali (Outil H). Cette activité est le résultat d’une réforme profonde du système d’enregistrement et de documentation des faits d’état civil, y compris, à travers l’ordonnance numéro 002/PR/2020 portant organisation de l’état civil en République du Tchad : enrôler les populations cibles au registre national de la population en incluant tous les ménages des déplacés du Lac. Ce projet d’enrôlement biométrique et de délivrance des documents d’identité vise pour sa phase initiale 5 138 personnes déplacées internes au Lac où il y a plus de 400 000 déplacés internes et environ 30 000 retournés tchadiens depuis le début de la crise sécuritaire en 2013. 47% de cette population, soit 189 270 personnes, sont en âge d’obtenir une carte nationale d’identité. Selon le Secrétaire Général du Département de Kaya, « pour cette opération, le HCR, les autres agences des Nations Unies, les organisations régionales, la société civile et les personnes à risque d’apatridie ont tous un rôle à jouer pour soutenir les efforts du gouvernement de la République du Tchad visant à mettre fin à l’apatridie d’ici 2024 ». Une situation qui prive souvent les gens de la possibilité d'étudier, de travailler, de voyager, de voter et de bénéficier de soins de santé.
Pour Brahim Ali Seid, responsable de la cellule coopération et de l’état civil à l’ANATS, « la poursuite de la délivrance des cartes nationales d’identité aux personnes déplacées internes de la province du Lac améliorera les données quantitatives et qualitatives sur les populations à risque d’apatridie au Tchad ». À ce jour, moins de 2,7% des personnes déplacées internes dans la province du Lac ont été enregistrées dans le cadre du programme de la délivrance des Cartes nationales d’identité. Les procédures visant à déterminer si elles sont bien des tchadiens, ce qui leur donne droit à une carte nationale d’identité, prennent du temps. Les équipes des organisations humanitaires, des autorités locales et des forces de police doivent faire des recherches dans des zones souvent difficiles d’accès et où la sécurité est très volatile. « Le programme exige beaucoup de temps et de ressources humaines et logistiques », explique Kahilo Jose Katunda, le chef de la Sous-Délégation HCR à Bagasola. « Outre les procédures ordinaires de vérification, il faut souvent obtenir des arrêts judiciaires des autorités locales pour valider la véracité de l’origine tchadienne des personnes. Entreprendre ce travail dans plus de 200 sites de personnes déplacées internes dans la province du Lac où la situation sécuritaire est fragile, peut se révéler extrêmement coûteux » rappelle Kahilo Jose Katunda. Le Tchad est l’un des pays africains où le taux d’enregistrement des faits d’état civil demeurent très faibles. 88 % des enfants de moins de cinq ans ne sont pas enregistrés à l’état civil. Sans enregistrement à l’état civil, les enfants ne peuvent pas avoir accès aux autres documents d’identification nécessaires pour prouver leur identité et accéder aux services de base. Ce taux est davantage plus faible dans les zones rurales où les sites des personnes déplacées internes sont installés. Avec des financements complémentaires, le programme pourrait favoriser l’enregistrement des Tchadiens déplacés dans la province du Lac autant que des personnes nées et élevées au Tchad.
« Il est essentiel de faire en sorte que ces communautés n’aient plus à vivre dans un éternel no man’s land administratif et qu’elles se voient garantir l’accès à l’éducation, aux soins de santé et aux services publics », déclare Kahilo Jose Katunda. L’obtention de papiers d’identité a permis à Kaltouma de se sentir enfin en sécurité et d’envisager des voyages à N’Djamena (capitale du Tchad) pour rendre visite à ses enfants. « Ma carte d’identité tchadienne me donne l’assurance que je suis pleinement tchadienne, d’accéder aux services et de participer à la vie de la communauté », conclut-elle toute joyeuse. Ahmat, 60 ans reprendra ses activités de pêche et ses voyages commerciaux au Cameroun et au Niger après la réception de sa carte nationale d’identité.