Douze provinces du Tchad qui présentent un taux de malnutrition aigüe global supérieur à 15%, seuil d’urgence pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Cette histoire a été originellement publiée sur YALNA "Nos enfants", le blog officiel de l'UNICEF au Tchad.
Qu’est-ce que tu feraus si ton enfant avait la fièvre, vomissait et refusait de s’alimenter ?
Balkisa n’a eu aucun doute. Elle a amené sa petite Youssoura, âgée à peine de 21 mois à l’hôpital de Mao. C’était un jour de juillet, quand la fraîcheur des premières pluies soulageait les populations du sable au bon milieu de la ceinture sahélienne. Ici un enfant sur huit meurt avant d’atteindre l’âge de 5 ans pour des maladies infantiles courantes, principalement le paludisme, la pneumonie et la diarrhée, avec la malnutrition comme facteur contributif majeur. D’ailleurs Mao est situé dans l’une des 12 provinces du Tchad qui présentent un taux de malnutrition aigüe global supérieur à 15%, seuil d’urgence pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Des chiffres* qui ne laissent rien à l’imagination, des numéros qui prennent la forme d’une sirène rouge appelant à l’alerte et à l’action.
Youssoura était sévèrement malnutrie selon le diagnostic de l’agent de santé. Elle avait perdu du poids et n’avait plus de force. Son petit sourire n’éclaircissait plus son visage. L’action immédiate était de l’admettre dans le programme de prise en charge afin de sauver sa vie. C’est ainsi que débuta le traitement avec l’antibiothérapie et la réhabilitation nutritionnelle avec l’aliment thérapeutique prêt à l’emploi communément appelé le Plumpy Nut – 3 sachets par jour- dans une Unité Nutritionnelle Ambulatoire (UNA). Après quelques semaines de traitement, Youssoura avait repris le poids selon sa maman qui priait le bon Dieu d’avoir sauvé son enfant. Malheureusement, il s’en ait suivi 5 semaines plus tard une épisode de paludisme et de déshydratation qui conduit l’enfant et sa maman à l’hôpital de Mao encore une fois.
« Je pensais que j’allais perdre Youssura, mon seul enfant. Je ne pouvais plus travailler, car je ne la laissais une seule minute », nous témoigne Balkisa, jeune mère d’origine nigériane, vivant avec ses 2 coépouses et leurs enfants au centre-ville de Mao. Leur mari est parti un jour pour le Niger et n’est jamais rentré. Un accident de moto l’a arrêté, gravement blessé, sur le chemin pour son village natal où les funérailles de son père avaient eu lieu. Depuis lors, aucune nouvelle. L’absence de l’homme a fait de la famille matriarcale un soutien indéniable pour Balkisa. « Durant les deux mois et demi, faits de va et viens entre la maison et les services de santé, mes coépouses me consolaient, me préparaient à manger et survenaient aux besoins du foyer. Elles m’ont beaucoup aidé », continue Balkisa.
Deux mois et demi, cela a été le temps de maladie de Youssoura, le temps de descendre jusqu’au fond du puit et remonter vers la lumière du midi. Un clin d’œil pour un enfant qui a toute une vie devant, si et jamais, entre autres, ait la chance d’avoir accès aux services médicaux de qualité et à une alimentation adéquate, variée, et équilibrée.
Youssoura mange tout maintenant et joue avec ses frères et sœurs à faire la cuisine.
«Je suis contente de voir un enfant passer par des complications médicales et ensuite retrouver la santé », nous dit Achta, infirmière de l’UNA de Mao Centre qui a suivi ce cas. «La maman de Youssoura m’a aidé pendant l’administration du traitement. Elle respectait les doses et écoutait mes conseils. Elle venait régulièrement aux contrôles. La réussite dépend aussi des mères et de leur rôle de protectrices à la maison où nous – les agents de santé- ne sommes pas présents. Balkisa est tellement collaborative, qu’elle nous aide à sensibiliser les autres femmes du village. » En effet, elle utilise l’histoire de sa fille pour convaincre et accompagner les mères à aller à l’hôpital dès qu’elles observent des signes inhabituels chez leurs progénitures.
Qu’est-ce que tu rêverais pour le futur de ton enfant, s’il/elle avait failli mourir de malnutrition ? Balkisa répond sans hésiter : « Je rêve qu’elle devienne doctoresse pour aider les autres enfants, comme Achta l’a fait pour elle au moment de la maladie ! »
Pour prévenir la malnutrition, assurer une prise en charge adéquate de la malnutrition aiguë sévère et éviter les rechutes, l’UNICEF soutien- grâce au financement d’ECHO -l’amélioration de l’accès aux services nutritionnels à travers le traitement des cas sévères, mais aussi le renforcement de la prévention par des approches novatrices comme l’approche communautaire sur les 1 000 premiers jours, la détection précoce des enfants malnutris et leur référencement vers les formations sanitaires, la prise en charge adéquate par le renforcement des capacités des agents de santé et l’appui en équipements et intrants nutritionnels, l’accès à l’eau, aux services d’assainissement et d’hygiène dans les centres nutritionnels, pour les enfants de moins de 5 ans. Le présent projet cible 40 000 enfants de 0 à 59 mois souffrant de malnutrition aiguë sévère (MAS), dans 16 provinces prioritaires du Tchad qui sont parmi les plus affectés par la malnutrition aiguë.